L'inspiration à travers le dépassement de soi : À la rencontre de l'athlète paralympique Sébastien Bichon.

Dans la vie, il arrive parfois que les obstacles se dressent devant nous, testant notre volonté et notre détermination. Mais il existe des individus qui parviennent à transformer ces défis en opportunités pour se dépasser et inspirer les autres. Amputé à l’âge de 4 ans, Sébastien Bichon, athlète de haut niveau - médaille de bronze en cyclisme sur route aux Jeux Paralympiques de Sydney s’il vous plaît - est l’un de ces exemples inspirants. Malgré un accident qui a changé sa vie à jamais, Sébastien a su transformer son handicap en une force motrice, accomplissant des exploits remarquables et devenant un porte-parole de résilience. Partenaires de sa grande aventure Handi-Plano, un défi audacieux consistant à parcourir 1500 km à VTT sur l'altiplano bolivien, nous avons eu le privilège de rencontrer Sébastien et de partager son expérience incroyable. 

 

U-Exist : Bonjour Sébastien. Pouvez-vous nous présenter votre parcours ? 

Sébastien Bichon : Je suis un conférencier qui partage des moments clés de mon parcours de vie. Depuis l'âge de 4 ans, je suis amputé et j'ai réussi à surmonter cette épreuve en devenant un athlète de haut niveau. J'ai remporté la médaille de bronze en cyclisme sur route aux Jeux de Sydney en 2001, puis j'ai continué à pratiquer le sport et à explorer ma passion pour la montagne. J'aime les paysages, les voyages et la randonnée... j'ai également gravi deux fois le Mont-Blanc. Je prépare actuellement de nouvelles aventures pour la fin de l'année, notamment le défi Handi-Plano pour lequel U-exist.

UE : Pouvez-vous nous parler de ce défi Handi-Plano ?

SB : Handi-plano c’est une aventure qui se vit à quatre : trois personnes valides et une personne en situation de handicap (moi). L’objectif de cette aventure est de changer de regard sur le handicap, de continuer à en montrer une image positive et de prouver que l’on peut tout à fait vivre de la plus belle des manières. Nous voulons prouver que malgré les limites que nous nous imposons, tout est possible si nous croyons en nous-mêmes. Le défi consiste à parcourir 1500 km à VTT sur l'altiplano bolivien, avec une altitude constante de 4000 mètres. Après dix jours de vélo, nous laisserons les VTT de côté pour escalader le sommet de Sajama, qui culmine à 6542 mètres d'altitude. C'est pourquoi la préparation de ma nouvelle prothèse de marche est essentielle. Une fois cette ascension réalisée, nous reprendrons nos VTT et continuerons jusqu'au sud de la Bolivie, puis nous nous rendrons en Argentine, où nous terminerons par l'ascension de l'Aconcagua, le point culminant des Amériques, à 6962 mètres d'altitude. Cette aventure durera au total 50 jours.

UE : Quelle sorte de préparation cela demande-t-il ?

SB : La préparation n'est pas aussi intense sur le plan de la performance que celle des Jeux de Sydney, par exemple. Il s'agit principalement d'un travail d'endurance. Je maintiens un niveau sportif correct grâce au vélo, et lorsque le moment sera venu, nous intensifierons un peu l'entraînement, mais sans excès.

UE : Avez-vous toujours eu cette double passion pour la montagne et le vélo ?

SB : Oui, ma passion vient principalement du plaisir d'être en mouvement, que ce soit à vélo ou à pied, et de la joie de découvrir des paysages grandioses. La montagne permet de combiner facilement ces deux passions.

UE : Qu'est-ce que vous recherchez au fond de vous-même lorsque vous vous lancez dans ce genre de défis (Jeux olympiques, ascensions, défi Handi-Plano) ?

SB : Pour moi, c'est avant tout le plaisir qui compte, même s'il y a aussi un aspect compétitif et la volonté de gagner. Inconsciemment, je sais que l'accident que j'ai subi a joué un rôle. J'ai décidé de ne pas être inférieur aux autres et de prouver que je pouvais être aussi fort, voire plus fort que les personnes valides. C'est ce qui a été un moteur pour moi, même si je l'ai réalisé plus tard. Mais quand je parle de défi, ce n'en est pas vraiment un pour moi, c'est surtout une question de plaisir personnel. Même pour le défi Handi-Plano, c'est mon frère qui avait envie de partir en Bolivie, et je lui ai proposé de l'accompagner. Cela a commencé sans qu'on se fixe un défi précis. J'avais simplement envie de découvrir de beaux paysages, de faire des rencontres. C'est ainsi que les choses ont commencé. J'ai gravi le Mont-Blanc pour la première fois en 2016 et ensuite en 2019. Au départ, il n'y avait pas cette notion de défi, j'avais simplement envie d'y aller parce que cela devait être superbe et magnifique. C'est vraiment cela qui a été ma motivation de base.

UE : Aujourd'hui, on a l'impression que vous souhaitez inspirer d'autres personnes grâce à votre parcours.

SB : Oui, c'est tout à fait cela. C'est pourquoi j'ai décidé de changer d'activité. Il est important pour moi de transmettre des messages sur le dépassement de soi et la résilience. Si je peux apporter des clés aux autres, les inspirer et leur donner un déclic, c'est un véritable moteur pour moi.

UE : Ne pensez-vous pas qu'il puisse y avoir des limites à cela ? Certaines personnes ne peuvent pas forcément s'identifier à un athlète de haut niveau. Qu'en pensez-vous ?

SB : Je comprends cette perspective, c'est pourquoi j'interviens souvent dans les écoles. L'idée est de montrer que nous sommes tous pareils et que si j'ai réussi dans un domaine, d'autres peuvent le faire aussi, même si ce n'est pas nécessairement dans le sport. Chacun peut réaliser ses passions dans le domaine qui lui plaît. Le message que je veux transmettre, c'est que lorsque vous souhaitez faire quelque chose que vous aimez et qui vous passionne, les obstacles n'ont qu'à bien se tenir. Dans cette optique, j'ai réalisé un documentaire intitulé "Born-To-Ride" qui relate mon parcours de 1200 km en vélo en moins de 5 jours, et j'ai également écrit un livre qui raconte cette aventure ainsi que mon parcours de vie.

Photo : Pierre Bouras

UE :  Sur cette photo de vous au Mont-Blanc, on peut admirer votre belle prothèse U-Exist. C’est important pour vous la personnalisation d’appareil orthopédique ?

SB : Oui, complètement. Ma première prothèse personnalisée date de 2019 et avant cela, j'utilisais des prothèses standard, de couleur chair et en polyester, sans aucun choix. J'ai eu un déclic en tant que jeune adulte lorsque j'ai commencé la compétition. J'ai réalisé que, pendant mon adolescence, j'étais gêné par le regard des autres. Je portais un pantalon de survêtement même en été, par exemple. Même si tout le monde savait que j'étais amputé, je n'étais pas à l'aise. Maintenant, c'est complètement l'inverse : je ne cache même plus ma prothèse avec de la mousse, car mon objectif est de communiquer et de transmettre des messages. L'esthétique est importante, car elle attire l'œil et me permet d'avoir un motif qui me plaît. C'est crucial d'avoir une esthétique personnalisée, que ce soit un choix standard ou personnalisé. Je sais que cela peut avoir un impact.

J'aimerais partager une anecdote avec vous. Une fois, à Briançon, j'ai fait une sortie à vélo, puis je suis rentré chez moi pour me doucher. Sans avoir encore rangé mon vélo, je suis ressorti en short et en t-shirt. J'ai entendu quelqu'un me dire "merci, merci". Initialement, je n'ai pas réagi car je ne pensais pas que cela m'était adressé. Cependant, cette personne a insisté, alors je me suis retourné et lui ai demandé pourquoi il me remerciait. Elle m'a expliqué que son petit-fils devait se faire amputer à cause d'un problème à un pied. La famille était découragée, les parents étaient abattus et ils ne savaient pas comment leur enfant allait réagir. En me voyant, mobile et à l'aise avec ma prothèse, j'ai pu leur redonner espoir. Cette expérience m'a fait comprendre l'importance de montrer cela et d'avoir une prothèse esthétique. Ces interactions créent des conversations, des sourires et permettent de dédramatiser la situation.

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